Le premier Ministre a décidé d’organiser un « conclave », rebaptisé officiellement « délégation permanente des partenaires sociaux », visant à rouvrir le chantier de la retraite. Dans le cadre des discussions entre les organisations syndicales et patronales, il a mandaté la Cour des comptes pour une mission flash sur l’état des finances de notre système de retraite, afin d’éclairer la réflexion sur les évolutions à apporter à la réforme de 2023. Le 20 février dernier, l’institution a remis ses conclusions et contrairement aux allégations du premier Ministre, elle indique que si les perspectives sont préoccupantes, la Cour des comptes considère que le déficit en 2035 se situerait entre 14 et 15 Mds d’euros, bien loin des 55 Mds d’euros qu’il a annoncé !
Toutefois, cette dernière soumet plusieurs pistes qui permettraient selon ses projections de retrouver, sur le long terme, un équilibre financier. Parmi ses propositions, comme le passage à 65 ans de l’âge d’ouverture des droits, l’augmentation d’un an de la durée d’assurance (nombre de trimestres)… elle suggère de revoir les conditions d’indexation des pensions sur l’inflation… ce qui serait selon l’institution la piste la plus efficace !
Cette idéologie de désindexation des pensions n’est pas nouvelle ! N’oublions pas qu’elle était déjà, en novembre dernier, une orientation du gouvernement Barnier pour réduire la dette publique !
Après les déclarations du président du MEDEF qui préconisait de supprimer l’abattement de 10 % aux retraités, l’amalgamant avec les frais professionnels et celles de la Ministre du Travail, sur TFI, estimant que les 40 % de retraités les plus aisés (lesquels ?) pourraient contribuer au financement de la protection sociale, cette recommandation pour financer les retraites est une nouvelle arnaque à l’encontre des retraités.
D’ailleurs, dans le cadre de la dette, le nouveau locataire de Matignon n’exclut pas ces pistes d’économie visant à faire contribuer toujours plus les retraités.
Pour Force Ouvrière, une fois de plus, les seules hypothèses retenues pour pérenniser notre système de retraite par répartition consistent à exiger des salariés du privé comme ceux du public davantage d’efforts, à taxer ces soi-disant « nantis » que seraient les retraités.
Spolier les retraités de leurs droits à vivre décemment, à aider leurs enfants à faire face aux aléas de la vie, c’est cela que nos élites veulent nous imposer ! Si nous les laissons faire, leur apologie conduira à abaisser considérablement notre niveau de vie, à accentuer la paupérisation des retraités, sans pour autant s’attaquer aux vraies causes du déficit de notre système de retraite et au delà de la dette publique.
Mais, dans ses recommandations, la Cour des comptes écarte toute idée de mettre à contribution, les plus riches et les entreprises. Pourtant, en 2024, les aides et exonérations de cotisations sociales dont bénéficient les entreprises représentent près de 170 milliards d’euros. Depuis 2018, la baisse de fiscalité octroyée à ces dernières et aux plus riches a coûté plus de 60 Mds d’euros au budget de l’État.
Pour Force Ouvrière, les nantis ne sont pas les salariés et encore moins les retraités ! Depuis 2017, ces derniers ont perdu en moyenne entre 2,5 et 3 mois de pension. Parallèlement, sur la période 2018 à 2023, les dividendes et rachats d’actions versés aux actionnaires ont progressé de 40,6 Mds d’euros (57,3 Mds en 2018 et 97,9 Mds en 2023) soit 41 % d’augmentation ! Le moins que l’on puisse dire c’est que les revalorisations des retraites, salaires et rémunérations n’ont pas été du même niveau !
Quant au soi-disant avantage de l’abattement des 10 % et la revalorisation des retraites, rappelons que :
- la déduction de 10 % pour frais professionnels concerne les revenus salariaux (Code Général des Impôts) ;
- l’abattement de 10 %, et non la déduction sur les pensions, n’est pas une niche fiscale et a été instauré par la loi de finances de 1978. Il rétablissait une certaine équité pour les retraités qui étaient pénalisés par les modifications successives apportées dans le cadre du calcul de l’impôt et dont les principaux bénéficiaires n’étaient ni les retraités, ni les salariés. Ces deux dispositifs visent à renforcer la justice fiscale car les retraités comme les actifs ne peuvent pas tricher sur leurs revenus, vu qu’ils sont déclarés par un tiers, contrairement aux adeptes de l’évasion fiscale (autour de 80 Mds d’euros) ;
- la revalorisation des retraites de 2,2 %, en janvier dernier, n’est pas un cadeau mais juste l’application du Code de la Sécurité Sociale qui indique que les retraites sont revalorisées au 1er janvier de chaque année sur la base de l’inflation moyenne des douze derniers mois. Cette revalorisation est, en fait, un rattrapage de la perte du pouvoir d’achat subit en année N-1.