Trouvant ses origines dès l’Ancien Régime avec les personnes au service de la monarchie, son concept progresse au cours de l’histoire lors, notamment sous la Révolution, de l’abolition des privilèges. Au cours du XIXème siècle, apparaît la mise en place des corps, divisés en grades ou classes. Parallèlement, les agents sont recrutés par concours ou sur titres et relèvent d’obligations strictes en matière de résidence, de devoir de réserve, de ponctualité… Alors que, au début du XXème siècle, quelques lois amorcent un statut des fonctionnaires, l’état de siège, en août 1914, vient balayer ces timides tentatives.
Par la suite, et dès sa prise de pouvoir, le régime de Vichy promulgue la loi du 17 juillet 1940 rendant très restrictif l’accès aux emplois publics ; il édicte également, en 1941, dans une perspective corporatiste, un premier statut général des fonctionnaires (déclaré nul à la libération).
Il interdit en particulier les organisations syndicales. Il faut attendre le Gouvernement provisoire de la République Française pour voir l’élaboration (avec la participation en nombre de syndicalistes résistants) d’un statut général de la fonction publique, statut adopté par l’Assemblée nationale constituante et qui devient ainsi la loi du 19 octobre 1946. Elle est elle-même remplacée par l’ordonnance du 4 février 1959, suite à l’entrée en vigueur de la constitution de 1958.
De leur côté, les agents des collectivités territoriales et des hôpitaux publics sont soumis à des statuts différents.
Le Président François Mitterrand et son ministre de la fonction publique Anicet Le Pors, établissent entre 1983 et 1986 un nouveau « statut général de la fonction publique » qui concerne cette fois l’ensemble des fonctionnaires des trois fonctions publiques.
Ses grands fondements se résument au respect, par le service public, de trois principes fondamentaux : la continuité du service public, son adaptation en fonction des besoins des citoyens et de l’évolution technologique, l’égalité des usagers placés dans une situation identique et son corollaire, la neutralité des agents publics.
Quand nous allons à l’hôpital, le personnel ne s’occupe pas de notre origine socioprofessionnelle, de notre capacité financière ou de nos opinions politiques, il nous soigne ! L’État est garant de la solidarité sociale. La plupart des agents publics s’investissent énormément dans leur mission, sans compter leurs heures. Ils sont dans une autre logique que celle du marché.
Aujourd’hui, la fonction publique c’est quoi ?
Au sens strict, elle comprend l’ensemble des agents occupant des emplois permanents de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics hospitaliers. On en dénombre près de 5,7 millions, qui se répartissent ainsi : 50 % dans la fonction publique d’État, 30 % dans la fonction publique territoriale et 20 % dans la fonction publique hospitalière. La fonction publique de l’État comprend les effectifs des établissements d’enseignement, des administrations centrales (ministères, préfectures, rectorats, directions régionales et départementales) ainsi que ceux de La Poste et d’Orange. Parmi tous ces personnels, beaucoup ne sont pas fonctionnaires. Ne le sont, de fait, que ceux soumis aux statuts définis par l’État pour chacune des entités précitées.
Libéralisme outrancier contre service public
Le dogme des libéraux est que la vertu fondamentale de l’économie est d’offrir le choix au consommateur. Ils prétendent ainsi agir pour son bien. Ils pointent leur volonté de moderniser avec l’idée sous-jacente de ringardiser le service public. On passe du service « standardisé » à celui sur mesure, à la prestation individualisée, spécifique à chacun. La modernisation, c’est l’ouverture à la concurrence, via des gains de productivité permettant la baisse des prix. À cela s’ajoutent l’innovation et le développement de nouveaux services marchands.
À Force Ouvrière, nous rappelons que la concurrence peut avoir de terribles effets négatifs ; une fois installée, elle créé une société duale, dans laquelle les services publics (ce qu’il en reste) sont réservés aux pauvres, tandis que les plus aisés s’adressent à des fournisseurs privés.
Lors d’un entretien accordé en 2003 par François Roussely, alors PDG d’EDF, celui-ci a clairement indiqué que la concurrence ne mènerait pas à une diminution des prix. Il a même déclaré que l’on ne pouvait pas, avec un marché ouvert, avoir les tarifs du monopole. Autrement dit, et c’est un fait passé régulièrement sous silence, la concurrence est coûteuse, tout simplement parce qu’il faut plusieurs entreprises au lieu d’une seule.
L’objectif réel du libéralisme est de réduire le bien commun en créant toujours plus d’offres individualisées.
Dans ce paradigme, la dimension humaine n’a pas sa place. La marchandisation à outrance de la dépendance, le scandale des EPHAD, notamment dans le domaine privé, sont la preuve qu’il s’agit d’attaquer directement le principe de base « à chacun selon ses besoins » pour lui substituer la règle du libéralisme triomphant : « à chacun selon ses moyens ». Il n’est pas acceptable que des nécessités aussi vitales que l’eau ne soient pas un bien commun régi, non pour les profits de sociétés cotées en bourse, mais pour la satisfaction des besoins de nos concitoyens.
Une ligne de bus n’existe pas pour être rentable, mais pour permettre à des personnes de circuler.
Pour Force Ouvrière, la démocratie ne prend son sens réel que si elle offre la possibilité de s’éduquer, de se cultiver, de se soigner, tout autant que de pouvoir travailler, communiquer. C’est bien le service public qui assure tout cela.
La Poste et Orange des cas atypiques
Pour des raisons de choix économiques et politiques, par ailleurs contestés par les militants Force Ouvrière, certains établissements publics (ONF) voire ex-administration (PTT) comme La Poste et France Télécom/Orange, qui conservent une partie de leur personnel relevant du corps des fonctionnaires de l’État, passent aujourd’hui, pour l’embauche, par les règles du droit privé.
Selon son dernier bilan social, 56 568 fonctionnaires sont toujours employés à La Poste, devenue par la loi du 2 juillet 1990, un établissement autonome de droit public avant d’être transformée en une société anonyme. Côté Orange, ce sont 22 262 fonctionnaires, qui continuent à y officier. Ils ne sont pas rémunérés sur le budget de l’État mais sur les recettes de leur entreprise. Compte tenu des départs en retraite, le nombre de fonctionnaires de l’État s’amenuise, tournant ainsi bientôt, plus définitivement encore, la page du service public des PTT !
Les élections de décembre 2022 dans la fonction publique s’inscrivent dans la défense du service public et de ses agents !
L’enjeu de ces élections n’est pas restreint à la seule défense des conditions de travail et de rémunération des agents publics. Au-delà de veiller aux intérêts particuliers des salariés, fonctionnaires et agents publics de l’État, des collectivités territoriales, de l’hôpital, il s’agit de défendre le service public et d’en rappeler le besoin. Il est ici question d’égalité de droits et de traitement des citoyens, quel que soit le lieu où ils vivent, quelle que soit leur condition sociale.
En matière de service public, notre revendication s’adresse à tous car il en va de la qualité de notre éducation nationale, de notre santé, de notre sécurité, de notre justice, de l’aménagement du territoire, de la présence postale, de la protection sociale, de la gestion des finances publiques…
Le syndicalisme indépendant, porté par Force Ouvrière, a un rôle essentiel à tenir. Il convient d’informer de son action chaque électeur de notre entourage afin d’affirmer, plus encore, sa première place dans la fonction publique de l’État et permettre sa progression dans la fonction publique hospitalière comme dans la fonction publique territoriale.
À La Poste comme à Orange, les militants FO Com s’engagent au quotidien avec des revendications claires sur les salaires, l’emploi, les conditions de travail. Ils se saisissent des nouvelles attentes sur le télétravail, la mobilité et les transitions, numérique comme écologique.